Matthieu Gosztola - Extraits
Matthieu Gosztola - Extraits
Chaque matin
La veuve emplit deux tasses
Chaque matin
Elle vide le contenu d'une tasse
Dans l'évier
Le corps debout dans la cuisine
Elle égrène un chapelet de groseilles
Il y a quelques jours encore
Tout était à sa place
Au réveil
J’ai assisté impuissant à
La dispersion des feuilles de mon arbre
Dans le vent jaune
Elle est belle
À en vivre Chaque jour
Elle m’apporte l’envie
Sur sa robe
Sur la chaise l’empreinte
De mes doigts
Tu adresses timidement quelques mots à la serveuse
(ta commande)
Elle s’approche trop près, te frôle (caresse ton âme)
Tu te réveilles entre ses bras humides
Pour s’expliquer, elle dit avoir retrouvé en toi
La couleur inimitable des yeux de son père
Les tranches dans mon chocolat
Au réveil
Si elles n’ont pas le goût de tes lèvres
Ne passent pas
Il n’y a jamais assez de tendresse
Pour un homme rongé par l’idée du dernier voyage
Mes mains
Sur tes paupières
Ferment le jour
Tu t’approcheras dans une robe légère
Pour prendre la mesure
De ma solitude
Hier
Nous avons refait une pioche
Après avoir mal distribué les caresses
Humer l’espace autour d’une fleur
Se souvenir des choses
Qui n’auront lieu que demain
Mettre le feu à notre vie
Pour que la partie qui ne brûle pas
Nous apparaisse
Deux pétales rapprochés avec le pied
Un improbable papillon
Suicide
L’homme attend pour plonger
Que son ombre soit prête
Un coquelicot :
Des fragments de papier japon
Cousus entre eux
Puis agrafés au vent
Ce matin
Ecrasant la pelure d’un oignon
Le sentiment de distraire
L’ordre des choses
L’instant est commun :
Un clarinettiste à la fenêtre
Tire sur la jupe du réel
Rendant rêche un côté de la chaise
J’invente un sexe à ton souvenir
Il y avait toi et rien ne manquait
Il y avait même beaucoup plus
Il restait quelque chose
Quand tu n'étais pas là
Le mercure sous la main
Te prendre la main
Apportait une terrasse
Aux lieux
Où nous étions
Quand nos caresses se regardaient dans un miroir
C’était toujours toi qu’elles voyaient
Personne
Ne pouvait apparaître davantage
Les caresses nous prennent la bouche et les mains
Pour parler
Les caresses nous enlèvent
Puis nous reposent sur le lit
Portés par nos caresses
Nos visages nous deviennent familiers
Nos caresses sont des voleurs de menthe
Nos caresses changent le papier peint
Des pièces où nous faisons l'amour
La lumière démise
Dans une caresse
La lumière se dévide dans nos caresses
Nos caresses font de chaque instant
La plus haute syllabe de l’été
Fulgurance d’une caresse
Portant la nuit à notre oreille
INFO : http://leslettresdelaurelineamanieux.blogspot.com/2010/07/matthieu-gosztola-rendre-voix.html
Rien que les cinq premiers vers (sans préjudice du reste) ++++++
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