Dame Ise

Résumé
A la fin du IXe siècle, de sombres complots obscurcissent l'horizon politique au Japon.
L'Empereur Uda, qui aime les plaisirs des sens autant que ceux de l'esprit, décide de se tenir éloigné des intrigues de palais pour se consacrer à la création artistique, et s'entoure de poètes, de calligraphes et de peintres de talent qui feront briller l'art japonais d'un éclat nouveau. Parmi ces artistes, Dame Ise, poétesse admirée pour ses prouesses techniques et ses acrobaties verbales, chante l'amour avec ironie, mélancolie ou résignation.
C'est un choix de ses poèmes que nous donne à lire Renée Garde, qui tente de retracer la vie et l'univers mental de la poétesse à partir des éléments romancés que nous a laissés son Recueil personnel, et de ce que l'on sait aujourd'hui de son époque.

http://www.revue-tanka-francophone.com/livres_tanka.htm

Déjà présente dans le Man.yô-shû, la notion de mono no aware (émotion suscitée par la fragilité du monde qui nous entoure fréquemment traduite par " la touchante mélancolie des choses") devient indissociable du sens du beau,lequel va de pair avec celui de l'évanescence (hakanashi) de toute vie.
(introduction) 

Les mémoires d'Ise

(prose) l'écrin qui doit mettre en valeur les joyaux que sont les tanka (...)

Le thème du jardin à l'abandon et celui des longues pluies d'automne qui noient les feuillages pourpres, faisant jaillir des larmes de sang, sont souvent suggérées dans la poésie classique chinoise. Ils deviendront des thèmes récurrents de la poésie féminine japonaise (...)

P38
Lassé de ce monde
je suis devenu écume 
flottant sur la mer
tandis que vers le rivage 
s'amassent bien des rancœurs

P41
Entêtée d'un seul
ne vous laissez consumer :
l'unique constance 
en ce bas monde est sans doute 
celle des cœurs qui se lassent

(Pluvier) traditionnellement utilisé dans la poésie amoureuse pour chanter la solitude glaciale de qui a perdu son compagnon ou sa compagne, l'oiseau ne sert ici qu'à laisser des traces stériles sur la grève, image désignant les lignes d'écriture sur le papier.

Katsura (une sorte d'arbre de Judée) est le nom d'un arbre qui, selon une vieille légende chinoise, pousse dans la lune. La tradition japonaise s'est appropriée cette légende au point d'en faire un thème poétique fréquent. 

La linaigrette: cette plante (miscanthus, sorte d'herbe de la pampa) qui à l'automne arbore le long des champs ses grands épis ondoyant au vent, est l'une des sept herbes de l'automne répertoriées dès l'époque du Man.yô-shû et se trouve très souvent utilisée en poésie en raison de la richesse des métaphores qu'elle contient. 
L'épi (grains de riz ou plumet de graminées) est traditionnellement associé dans le waka à la révélation de l'amour. 
(...) Ce que recèle l'épi n'est pas là seule richesse métaphorique de ces graminées. Depuis le Man.yô-shû, les linaigrettes agitées par la brise sont comparées à des personnes qui font signe avec leurs manches (...)
Les fleurs de la lande 
d'automne ont-elles des manches ?
Car les linaigrettes 
aux épis avenants semblent 
engager à la rencontre
Paradoxalement, l'épi, qui est source de toutes les éclosions et de toutes les rencontres imaginables, devient aussi le symbole de ce qui étouffe le désir et entrave l'épanouissement de l'amour. En effet, la manche avenante et légère invitant au gré du vent celui ou celle qui se laissera séduire est la métaphore utilisée avant toute autre pour souligner le caractère inconstant et volage de l'amour.

 Le souverain et la favorite

p75
La teinte empourprée
des feuilles s'est confondue
- emportée au vent
comme un amour sans espoir -
avec celle de mes larmes

Le thème des pleurs se trouve encore dans les trois autres pièces consacrées à Xuan Zong: feuilles perlées de larmes, tentures de perles, feuilles ausi pourpres que des larmes de sang.

p77
Voici le jardin
tristement abandonné
aux feuillages pourpres
comme mon coeur affligé
jonché de ces quelques mots

p78
Pour servir de guide
n'était ce fragile esquif
d'infime nuée
bravant les mers qui viendrait
de ce monde de douleur

(...) la légende du Bouvier et de la Tisserande. Ces deux étoiles (Altaïr et Véga), séparées par l'obstacle infranchissable de la Voie Lactée, sont un symbole d'amour. Elles ne peuvent se réunir qu'une fois par an, la nuit du septième jour du septième mois, et cette nuit-là ce sont les pies qui forment un pont dans le  ciel pour leur permettre de se rencontrer
(...) de la mythologie chinoise, symbolisant l'harmonie des cœurs et des corps entre l'homme et la femme, les deux oiseaux biyiniao volant d'une seule paire d'ailes inséparables et les deux arbres entrecroisé au point de n'en faire qu'un

  Printemps qui nous abandonne

(...) l'homme est absence tandis que la femme est attente

p89
Noyée dans l'attente
comme ces pins dans la vague
je savais l'espoir
futile mais cette vue
me submerge de chagrin




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