Les Marins Xavier Grall

Les marins

Les vieux de chez moi ont des îles dans les yeux
Leurs mains crevassées par les chasses marines
Et les veines éclatées de leurs pupilles bleues
Portent les songes des frêles brigantines

Les vieux de chez moi ont vaincu les récifs d'Irlande
Retraités, usant les bancs au levant des chaumières
Leurs dents mâchonnant des refrains de Marie-Galante
Ils lorgnent l'horizon blanc des provendes hauturières

Les vieux de chez moi sont fils de naufrageurs
Leurs crânes pensifs roulent les trésors inouïs
Des voiliers brisés dans les goémons rageurs
Et luisent leurs regards comme des louis

Les vieux de chez moi n'attendent rien de la vie
Ils ont jeté les ans, le harpon et la nasse
Mangé la cotriade et siroté l'eau-de-vie
La mort peut les prendre, noire comme la pinasse

Les vieux ne bougeront pas sur le banc fatigué
Observant le port, le jardin, l'hortensia
Ils diront simplement aux Jeannie, aux Maria
« Adieu les belles, c'est le branle-bas »

Et les femmes des marins fermeront leurs volets

XAVIER GRALL (1930~1981)

Commentaires

Vu les sept derniers jours

Paul Eluard - Tout dire

Comme en Poésie - Les auteurs 2000 / 2015

Poésie ininterrompue - Eluard

Pablo Neruda 1904 - 1973

Charles Bukowski

Coquelicot - Guillevic

Coup de foudre - Wislawa Szymborska